Le
31 Janvier 2016, les Chefs d’Etat africains réunis au 26ème sommet
de l’Union africaine dénoncent l’acharnement de la Cour Pénale Internationale
sur les responsables africains. Une feuille de route pour un retrait collectif
de la CPI si leurs réclamations ne sont pas prises en compte est même adoptée .
Huit
mois plus tard, le Burundi annonce son retrait de la Cour Pénale
Internationale. L’Afrique du Sud lui emboîte le pas le 21 Octobre, suivi de la
Gambie quatre jours plus tard alors que la question est agitée dans
d’autres pays du Continent à l'instar du Kenya.
The AU has adopted my proposal for the AU to develop a road map for the withdrawal of African nations from the Rome Statute.— Uhuru Kenyatta (@UKenyatta) 31 janvier 2016
Que
s’est-il donc passé pour que tous ces Etats africains qui en 1998 ont été les
fers de lance de cette Cour en viennent à la honnir autant ?
Est-ce
une fuite en avant de responsables politiques souhaitant s’assurer une
impunité ? Ou le résultat d’une dizaine d’années d’existence d’une Cour
Pénale plus « Africaine » qu’Internationale ?
Il
faut dire que le bilan de l’Institution ne plaide que très peu contre cette dernière
hypothèse: 9
des 10 enquêtes ouvertes à nos jours concernent des africains.
Mais
loin de réfuter l’implication du « Terminator » Bosco Ntaganda dans
les crimes commis au Congo ni les exactions commises par les troupes de Jean
Pierre Bemba en Centrafrique, c’est surtout le sentiment d’avoir affaire à une
justice à deux vitesses qui est à l’origine de l’exaspération des Etats
africains.
La
Cour, de par sa vocation universelle, n’échappe malheureusement pas elle aussi aux
jeux de puissance s’opérant dans une Société internationale de nature
réfractaire à l’idée de justice pénale.
Les
prémices d’une telle situation étaient d’ailleurs perceptibles depuis le début
avec le refus des poids lourds de la scène internationale tels que les
Etats-Unis, la Russie, la Chine de s’engager dans l’entreprise juridique.
Ce
qui aura des conséquences désastreuses puisque le Conseil de Sécurité composé à
majorité de ceux-ci dispose d’une influence considérable sur la Cour.
Démesurée
puisque le Conseil de Sécurité a le pouvoir de faire ouvrir une enquête par le
CPI, de lui faire abandonner les poursuites qu’elle a enclenchées au nom du
principe très « flou » de maintien de la paix internationale.
Ainsi,
un Conseil de Sécurité dont à peine le tiers de ses membres sont des
Etats-Parties au Statut de Rome a donc la capacité de « commanditer » l’inculpation d’Omar El Bechir ou de Mouammar Kadhafi.
Et
cela dépend encore des relations de l’intéressé puisque le droit de véto est
utilisé en 2014 par les Russes et chinois contre le déferrement auprès du
Conseil de Sécurité de l’affaire des exactions commises par le régime syrien de
Bachar El Assad.
Cependant,
le tort de la CPI n’est pas à mettre seulement au compte du seul Conseil de
Sécurité. Son fonctionnement « suivant la tête du client » est
également décrié.
Difficile
en effet, de comprendre que la vitesse de diligence observée sur les affaires
Gbagbo, Béchir ou Kenyatta ne soit pas la même lorsqu’il s’agit d’accélérer les
enquêtes préliminaires sur les actes de violence des militaires britanniques
sur les populations civiles en Irak, des troupes américaines en Afghanistan ou
des massacres russes en Géorgie.
Hors,
la commission dans ces cas toujours à l’examen, des crimes de torture,
meurtres, actes inhumains …tels que visés par le Statut de Rome ne sont qu’un
secret de polichinelle.
L’adhésion
récente malgré les nombreuses pressions de la Palestine à la Cour Pénale
Internationale et la suite de sa plainte contre l’occupation israélienne de ses
territoires punie en principe par le droit pénal international, ne feront sans
doute que corroborer la thèse d’une Cour Pénale Internationale qui n’a pas fini
de perdre de sa crédibilité.